Les porteuses du Togo, “Superwomen” malgré elles

«Portefaix : Celui qui faisait métier de porter des fardeaux.»

‘‘Les porteuses du Togo, Superwomen malgré elles’’ est une série photographique qui documente la lutte quotidienne qu’affrontent chaque jours des milliers de femmes portefaix, pour leur survie, dans l’un des plus grand marché de la capitale togolaise.
J'ai choisi le terme « Superwomen » parce que tout simplement, je ne vois pas comment qualifier ces femmes autrement.
Il est important pour moi de les mettre en valeurs sur chaque image, de «sublimer» la dureté de ce quotidien afin de présenter, non pas le côté dramatique de la situation mais cette véritable force qui émane de chacune d’elles.

Au delà de mon engagement professionnel, nous avons crée un lien, c'est aussi pourquoi j'attache une réelle importance à ce projet photographique.

Ces femmes exercent le métier de portefaix, un métier ancestral mais encore bien ancré dans ce petit pays d'Afrique de l'Ouest. Il consiste à nettoyer la rue, à charger et décharger les achats et cargaisons des clients du marché pour une rémunération souvent dérisoire allant de 500 à 1500 CFA par jour ( 0.80 à 2,50 euros).

Cette activité permettant à ces femmes de survivre s’apparente fortement à de l’esclavagisme moderne. N’étant plus reconnu par l’état depuis quelques années, la rémunération se fait au bon vouloir du client qui, le plus souvent, ne paie pas son dû après la course.

De majorité analphabètes et parties de leur village en quête d'un avenir meilleur dans la capitale, ces travailleuses se retrouvent souvent isolées et pour survivre, se lancent dans le métier de portefaix.

Une des rues du grand marché de Lomé, beaucoup d'habitants s'y rendent pour faire leurs courses.
Hélène , femme portefaix, prends une caisse qu'elle devra transporter à l'endroit indiqué par le client au marché de Lomé.

Hélène, trente-neuf ans, originaire d’Aklakou, à quatre-vingt kilomètres à l’est de la capitale, fait partie de ces travailleuses. Comme pour toutes, le manque d’argent l’a poussé à rejoindre le marché. D’abord simple portefaix, Hélène est également parvenue à devenir commerçante, ce qui lui rapporte environ 1000 CFA (1.50 euros) par jour en complément de son salaire.

Depuis le départ de son mari et malgré sa double profession, Hélène livre, chaque jour, un combat afin de subvenir à ses besoins élémentaires et à ceux de ses enfants. Un train de vie qui ne lui laisse aucun répit. Entre les douleurs musculaires dû au poids des charges et le manque d'argent pour se procurer des médicaments, sa santé physique est quotidiennement mise à rude épreuve.

La journée de travail débute le plus souvent par le nettoyage des rues. Les commerçants du marché engagent une femme pour le nettoyage d’une zone précise.

Une des femmes balaie un stand de commerçant. La posture qu’elles doivent avoir, en plus du port des charges, leur cause, sur le long terme, de véritables problèmes physiques.

Une femme portefaix porte une caisse sur sa tête jusqu'au pousse-pousse au grand marché de Lomé.

De plus, comme la plupart de ces femmes, elle vit au marché, ses revenus aléatoires ne lui permettent pas de louer une chambre. Elle se regroupe alors avec ses enfants et d'autres portefaix, pour se sentir en sécurité, dans des campements de fortunes où de simples cartons et des pagnes jonchent le sol en guise de matelas. Une situation générale qui déclenche également chez ces femmes une détresse psychologique due à leur situation mais aussi aux nombreuses agressions dont elles sont victimes, «Beaucoup de femmes sont victimes d’abus sexuels et certaines ont tellement honte qu’elles repartent au village.» confie l’une d’entre elles.

Campement de fortune des femmes portefaix au milieu du marché où elles installent des moustiquaires pour se protéger.
Une femme portefaix dort sous sa moustiquaire au milieu du marché de Lomé encore fermé.

Les problèmes de santé font aussi partie des complications que ce métier leur impose : "J'ai eu beaucoup de complications lors de ma grossesse, j'ai aussi failli perdre le bébé, cela vient surtout du fait de porter des caisses de plus de 50kg de 6h à 20h" confie l'une d'entre elles, les larmes aux yeux.

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